02/09/2009

Penser, condition de l'existence

« Je pense donc je suis » a osé déclarer Descartes ouvrant pour chaque homme la possibilité - voire la nécessité - de penser par lui-même sans laisser cette faculté aux seuls soins des érudits. Ainsi la pensée serait par conséquent une des caractéristiques qui nous fait homme. A la bonne heure !
Un de mes amis de fac qui travaillait comme serveur en boulot d’appoint pour financer ses études répétant sans cesse : « je pense donc j’essuie » avec pour plus grande peur que ses études ne lui permettent pas d’exercer une autre profession. De fait, il se livrait chaque soir à une réflexion sans failles tout en nettoyant les tables du bar que nous avions salies. Café, bière, mégots de cigarettes avaient les plus souvent raisons de nos échanges. Après quelques idées griffonnées sur la nappe en papier, il se laissait aller à une rêverie tout en exécutant sa tâche.
Mais penser par soi-même ne doit pas être confondu avec penser pour soi-même encore moins penser à soi-même. Car la pensée n’est rien en soi et ne s’avère jamais plus féconde que lorsqu’elle est confrontée à divers avis. La pensée s’épanouit au contact des autres, qu’elles se rapprochent ou divergent. Et l’acte de penser se trouve surtout stimulé lorsqu’il est perturbé par les des avis contraires. Bref, pour envisager un maximum d’horizons, la pensée doit s’ouvrir.
La pensée à certes besoin de temps pour mûrir et capturer dans ses flots la matière de l’expérience. C’est parfois dans le repos que se résolvent les questionnements qui mobilisent tant notre esprit. Mais il n’en reste pas moins que la pensée, même la plus pure, s’affine à travers l’échange. Et cet échange nécessite de passer par le « je pense » où s’expose l’avis.
La première fois où je me souviens avoir employé le « je » dans une dissertation fût pour moi un véritable bonheur. J’ai ressenti cet acte aujourd’hui banal comme une libération. Exit la paraphrase, inutile le plagia, « voici que je vous parle en mon nom propre », ai-je sans doute pensé.
Quel plus grand plaisir que de livrer ce que l’on pense, son point de vue avec pour seul contrainte la rigueur de ses propres valeurs.
Bien entendu, ce jour que j’évoque là , ce n’était pas la première fois que je m’interrogeais moi-même sur une question et que j’allais puiser au fond de moi-même des idées et des arguments issus de ma propre interprétation d’un thème. Je n’avais pas attendu que l’on m’y invite pour me poser des questions, m’émouvoir d’observation et tenter d’articuler quelques idées issues de mes lectures ou de ma propre expérience. Mais ce jour où j’ai transmis ma propre expression, rédigée sur un support qui serait lu par quelqu’un d’autre fût pour moi un acte fondateur.

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